Quelle Europe pour demain ? Le conseil de circonscription (CDC) sous l’égide de Thomas Gassilloud, député du Rhône, a relayé jeudi 13 septembre, à Brindas, la grande consultation européenne — une première depuis la construction de l’Union européenne il y a soixante ans ! — initiée en avril dernier par le Président de la République, Emmanuel Macron.
Près de 80 personnes ont participé à ces échanges qui viendront enrichir le débat en cours organisé partout en Europe par des structures labellisées telles le CDC de la 10e circonscription du Rhône. “Il s’agit d’un CDC à la tonalité tout à fait particulière, ce soir, puisqu’il est consacré spécialement à l’Europe et à cette consultation”, présente d’emblée, Fabienne Tirtiaux, collaboratrice parlementaire chargée notamment de l’animation du CDC.
Qu’est-ce qui vous plaît , vous a plu dans les actions de l’Union européenne ? Qu’est-ce qui vous déplaît ou vous a déplu ? Qu’attendez-vous de l’Union européenne ? Pendant deux heures, après une rencontre dédiée au conseil municipal de Brindas, chacun a pu donner sa vision de l’Europe et surtout, ses attentes et aspirations, en présence de Philippe Gerard, membre de la Maison de l’Europe, Alain Malegarie et Audrey Soria, coordinateurs de la consultation (team Europe).
Avec un seul mot d’ordre : « la parole est aux citoyens… sur tous les sujets possibles et inimaginables”. Une quarantaine de thématiques ont été abordées tout au long de cette soirée constructive entrecoupée de commentaires souvent passionnés. “Dans notre monde d’aujourd’hui, face à la Chine et les Etats-Unis, notre seule chance de subsister, c’est l’Europe !”, clame haut et fort un premier intervenant, histoire de lancer le débat sur une note optimiste. Suivi par d’autres : “Sans l’Europe, la France n’a pas le marché suffisant pour négocier” ; “On l’aime, l’Europe”, assure l’un d’eux. Mais, en l’état, elle est “un repoussoir”, peste un autre. Un des participants compare même l’Europe à une “machine” dont on ne comprend pas forcément les rouages et qui a grossi — “On a intégré plein de pays” — et qui tend à “se gripper”… Bref, les participants apparaissent comme de fidèles partisans de l’Europe et sont conscients de son importance, sa nécessité (ne serait-ce que sur le plan économique) mais sont “déçus” et s’interrogent profondément sur son fonctionnement et ses méthodes. Relativisons tout de même : “la situation serait peut-être pire sans l’Europe”, nuance le député, Thomas Gassilloud.
Les sujets se succèdent. Citons pêle-mêle : l’agriculture (qui représente 40% du budget européen) ; la défense ; la lutte contre les paradis fiscaux et le blanchiment de l’argent sale ; la place de l’Europe dans le monde ; la mondialisation ; l’identité européenne ; l’Europe dans les programmes scolaires (“seulement en terminale”, déplore un étudiant) ; le fonctionnement même de l’institution pas toujours bien compris par « manque de communication » ou encore la très controversée directive Bolkestein, “un scandale”, lâche quelqu’un, dans la salle… Le sujet de la gouvernance européenne est lui aussi largement évoqué… et critiqué : “Les pays membres ne se mettent jamais d’accord à cause de la règle de l’unanimité !”, estime une dame. “Cette règle ne concerne que des domaines sensibles comme”, corrige Audrey Soria comme la fiscalité, la diplomatie ou la sécurité sociale. De là à imaginer un “gouvernement européen” voire une “Europe fédérale” pour faire naître les Etats Unis d’Europe”. Et pourquoi pas un référendum sur la question, suggère quelqu’un. Un observateur le reconnaît : “le sujet est tabou”…
“On aime l’Europe mais on est déçus par son inefficacité”, résume cet homme qui “souhaite un nouveau traité” et qui “rêve d’une Europe qui s’intéresse aux vrais sujets comme la politique étrangère, la situation au Moyen Orient, les migrants, l’environnement, l’énergie, l’harmonisation fiscale…”. Face aux Gafa (Google, Apple, Facebook, Amazon), les citoyens rêvent aussi d’un sursaut : “L’Europe pourrait financer des programmes d’innovation pour faire naître des géants”. “Nous allons avoir Galileo : pourquoi l’Europe ne communique-t-elle pas ? Tout le monde utilise un GPS !”, s’interroge quelqu’un.
Construire l’Europe de demain avec la population, c’est tout l’intérêt de cette consultation unique en son genre lancée à l’échelle européenne. Dans quelques jours, Fabienne Tirtiaux, pour le compte de la 10e circonscription de Lyon, ira porter, en mains propres, le très officiel formulaire de restitution de cette soirée pas comme les autres, à Paris. Et dès novembre, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) français organisera une restitution nationale des centaines de consultations françaises. Avant les restitutions européennes qui se tiendront lors du Conseil européen de décembre 2018. En attendant des actes… Le plus difficile reste à faire.