Jamais une séance du conseil de circonscription (CDC) n’aura suivi d’aussi près l’actualité législative. Réunis publiquement pour la 22ème fois, les citoyens ont fait preuve d’innovation, ce lundi 16 septembre à Marcy-l’Etoile. Sous l’impulsion de leur député Thomas Gassilloud, ils avaient acté l’idée, lors de leur précédente rencontre avant la trêve estivale, à Saint-Symphorien-sur-Coise, de suivre plus régulièrement les travaux législatifs.
Cette volonté s’est concrétisée début septembre, avec l’organisation, à Saint-Genis-Laval, de deux ateliers thématiques sur la loi de bioéthique en cours de révision et la loi anti-gaspillage et pour l’économie circulaire, deux projets de lois qui vont faire débat ces prochains jours, dans les rangs de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Ce 22e CDC marque ainsi officiellement cette nouvelle dynamique, amenée à se poursuivre tout au long de l’année. Le député s’est fait un devoir d’y participer afin de privilégier la proximité avec les citoyens et les élus locaux.
L’ordre du jour, particulièrement chargé, a tenu en haleine l’assistance pendant près de trois heures. Les premiers échanges ont tourné autour des grands chantiers à venir du gouvernement, dont la réforme des retraites. Thomas Gassilloud en est convaincu : “Il faut continuer sur ce rythme, en associant le plus possible les citoyens, même si ce n’est pas toujours simple. En tant que membre de la commission nationale de la Défense et des Forces armées et rapporteur du budget de l’Armée de terre, le député a également annoncé qu’il allait poursuivre cette année ces engagements, notamment au sein de l’IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale). Il aura l’occasion d’étudier les enjeux géostratégiques liés au changement climatique, un sujet brûlant tant à l’échelle locale qu’internationale.
Les discussions sont allées bon train, sans occulter les questions “qui fâchent”, telles les affaires De Rugy ou Ferrand suscitent de nombreuses interrogations quant à la responsabilité des élus, le problème des prisons ou encore la crise des urgences à l’hôpital. Ce dernier point a particulièrement animé les échanges, en revenant sur la nécessaire régulation des urgences aujourd’hui saturées (“le bon patient, au bon endroit, avec la bonne réponse”, plaide un médecin dans l’assistance), les conséquences du numerus clausus, la démographie médicale, l’accès aux soins, le plan “Ma Santé 2022” de la ministre Agnès Buzin, qui, aussi ambitieux soit-il, reste “un pansement” bien dérisoire de l’avis des citoyens présents… “On a encore des années difficiles devant nous”, estime l’un d’eux.

Pour lancer le premier dossier législatif de la soirée, une synthèse de la loi anti-gaspillage et pour l’économie circulaire a été présentée sur grand écran. Fabienne Tirtiaux, suppléante du député, a dévoilé le travail de Romain, ancien stagiaire au sein de l’équipe parlementaire, afin de rejoindre l’équipe de la ministre Brune Poirson. La loi, actuellement discutée au Sénat et prochainement à l’Assemblée nationale, devra répondre à l’attente de la population (la transition écologique était l’un des thèmes forts du Grand Débat national). “On a donc encore la possibilité de faire remonter des points de vue”, a commenté Fabienne Tirtiaux, suppléante du député, chargée spécialement de l’animation de la circonscription, expliquant la volonté de l’Etat d’en finir avec “l’économie linéaire” (extraire, fabriquer et jeter). Le but est de moins consommer et limiter au maximum le gaspillage des ressources naturelles et la production de déchets. Dans cette optique, chacun a son rôle à jouer : les consommateurs (appelés à changer leurs habitudes), comme les industriels et les producteurs… “Il y a une prise de conscience mais il faut éviter les “y’a-qu’à-faut-qu’on”, estime quelqu’un. Tous ces sujets sont très complexes et engage chacun d’entre nous.
Parmi les mesures phares de cette loi, on citera le retour de la consigne (“On revient à l’ancien temps !”, sourit un citoyen) ou encore l’interdiction de destruction de tous les produits invendus. “Mais les grosses boîtes préfèrent jeter pour ne pas payer la TVA”, relève quelqu’un : cette observation pertinente mérite d’être notée pour savoir exactement ce que prévoit le texte. La loi va aussi obliger les fabricants à financer “la fin de vie de leurs produits”, une obligation qui sera désormais élargie aux jouets, cigarettes, articles de sport, de jardinage, bricolage, de loisirs… Dans la salle, un participant se montre dubitatif : “Ce sont les consommateurs qui vont payer l’écotaxe ! Au-delà des bonnes intentions, nous paierons les produits fabriqués en France plus chers que les produits arrivant de l’étranger”.
Virginie qui gère la ressourcerie de Vaugneray a apporté son expertise locale, en tant qu’acteur de terrain. “Nous récupérons les objets dont les gens se séparent en leur donnant une seconde vie, tout en jouant un rôle social de réinsertion par le travail”, explique-t-elle. Une rencontre est prévue sur place, lundi 30 septembre, entre midi et deux, dans le cadre d’un nouvel atelier du CDC sur la transition écologique. Autre initiative à saluer, Patrick a fait part à l’assistance, à Craponne, du succès “assez phénoménal du café réparation” qui fédère quelques bricoleurs pour réparer des objets qui leur sont amenés. Une façon aussi de retrouver du lien social.

La bioéthique a animé la dernière heure et demie de la séance. Nicole et Armelle, deux fidèles du conseil de circonscription, ont présenté un résumé de ce projet de loi axé autour du don d’organes ; de l’intelligence artificielle ; de la recherche (notamment sur les cellules embryonnaires ou l’embryon) et de la génétique ; et enfin de la procréation médicalement assistée (PMA). “Le génome est un sacré sujet, c’est notre carte d’identité génétique, explique Nicole. Il y a là un besoin d’encadrement, notamment en interdisant toute modification d’un embryon humain par adjonction de cellules provenant d’autres espèces : cela paraît bizarre mais certains l’ont envisagé !”
En vue de cette loi, des études d’impacts “très poussées”, sur près de cinq cents pages, ont été menées, consultables sur le site internet de l’Assemblée nationale. Pour faire suite à de nombreuses années de travaux du Conseil national de la bioéthique et à de nombreux rapports parlementaires, une commission spéciale a été mise en place à l’Assemblée et a lancé, au mois d’août, une série d’auditions (à suivre également en ligne). “Je vous invite à les visionner, elles sont extrêmement intéressantes”, confirme Thomas Gassilloud. Avec “des intervenants de très haut niveau”, complète Armelle.
Certains articles du projet de loi ont fait débat : la suppression, en cas d’interruption médicale de grossesse, du délai de 8 jours de réflexion, ou encore la limitation de conservation à 5 ans des embryons “qui ne font pas l’objet d’un projet parental”. La future loi supprime aussi l’interdiction de prélèvement d’un organe chez un majeur protégé. Mais l’essentiel des discussions a porté sur la PMA qui sera désormais ouverte aux femmes seules et aux couples de femmes. Les enfants issus d’une PMA avec dons de gamètes pourront aussi, une fois adultes, avoir accès à leurs origines et connaître le nom du donneur. Autres nouveautés offertes par la future loi : la conservation des gamètes en vue d’une fécondation ultérieure ; la levée de l’interdiction du double don de gamètes simultanément ; et la suppression de l’exigence du consentement du conjoint pour le don de gamètes.

Dans la salle, certains voient à cet assouplissement de la loi, une ouverture dangereuse, au fil des ans, à la GPA (gestation par autrui). Guy, de Brignais, regrette, lui, que la famille soit totalement occultée de ce débat : “On parle de technique, mais pas de famille… C’est peut-être rétrograde de parler de famille, mais c’est pour moi l’essentiel, car l’amour qu’on donne à un enfant est le plus important”, estime-t-il. Quant à Loïc, il aurait “aimé que la majorité actuelle s’occupe de l’adoption avant de se pencher sur la PMA. Je trouve anormal qu’un couple homosexuel n’ait pas les mêmes chances d’aboutir à l’adoption qu’un couple hétérosexuel”.
Les discussions sont passionnées. “Il faut savoir écouter l’autre, savoir discuter, savoir comprendre et pas être toujours donneurs de leçons”, avertit un participant. Il y a toute une population modérée qui est peut-être troublée dans ses croyances, ses fondements, et qu’il faut respecter et ne pas heurter.” Le député suit avec attention, les avis des uns et des autres. “Je suis plutôt contre le fait de dire qu’il y a une voie de progrès et l’autre non, estime Thomas Gassilloud. A mon avis, il y a deux visions de la société et les deux sont défendables.” Nul doute qu’elles le seront lors de la conférence-débat que le conseil de circonscription envisage d’organiser, dans le courant du mois de novembre, en présence d’experts. En vue de ce grand rendez-vous, un nouvel atelier “Bioéthique” est d’ores et déjà annoncé début octobre. “La bioéthique désigne l’étude des problèmes éthiques et des questions de société soulevés par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé, lit, pour finir, Fabienne Tirtiaux. C’est un énorme chantier. Enrichissons-nous des points de vue des uns et des autre, continuons à avoir de l’empathie et à comprendre les avis de chacun.” Le prochain CDC est prévu, lui, le lundi 14 octobre.
