
Et si l’on positivait ? En ces temps de confinement, parfois pénible au quotidien, les citoyens du conseil de circonscription de Thomas Gassilloud, député du Rhône, ont décidé de prendre la crise sanitaire à contrepied et de n’en retenir que les effets positifs.
A quelques jours d’un déconfinement progressif de la population, prévu pour le 11 mai prochain, le débat public organisé ce lundi 4 mai en visioconférence, a insufflé à ses auditeurs — une centaine devant leur écran d’ordinateur — une vague d’espoir en l’avenir. “On vit une période particulière et il nous a semblé important que des citoyens nous témoignent, ce soir, des initiatives qu’ils ont mis en place ces dernières semaines et de leurs bonnes pratiques qui pourraient être pérennisées à l’issue du confinement”, expose Fabienne Tirtiaux, suppléante du député, en guise d’introduction. Pendant plus de deux heures, ce 8e débat pas comme les autres — sans “pour” ni “contre” mais riche en témoignages — aura aussi permis de tirer les leçons de cette crise inédite, pour mieux rebondir à tous les niveaux : éducation, Europe, économie, santé, environnement, vie sociale… Autant de thématiques abordées tout au long de cette rencontre “enthousiasmante” et ô combien “rassurante”, pour reprendre les termes de l’animatrice de la soirée, loin de ces polémiques et autres discours anxiogènes.
Education : des outils numériques à apprivoiser et de nouvelles pratiques à promouvoir
D’emblée, un père de famille rend hommage à la communauté éducative, reconnaissant qu’on ne s’improvise pas enseignant. Surtout lorsqu’il faut concilier le suivi des devoirs des enfants à domicile et le télétravail des parents. “En temps normal, on s’est aperçus qu’on déléguait beaucoup en s’appuyant sur l’école, mais aussi sur les associations et la baby-sitter. Cette crise nous aura permis de redécouvrir la famille, confie-t-il. On a dû demander conseil à des amis enseignants pour nous accompagner.”L’Education nationale, elle aussi, a dû se remettre en question et innover avec un enseignement à distance à organiser pratiquement du jour pour le lendemain. Les professeurs ont dû apprivoiser les outils numériques et les “classes virtuelles”. Pas simple de l’avis de Jean-Louis Gomez, directeur d’école. Non seulement pour les enfants pour qui “la sociabilité est essentielle”, insiste-t-il. Mais aussi pour les enseignants dont les appétences pour les nouvelles technologies sont très hétérogènes, regrette Marc : selon lui, l’Éducation nationale devra nécessairement “se mettre à niveau”. “Nous avons dû travailler différemment avec la visioconférence et nous n’étions pas forcément prêts, reconnaît le directeur d’école, mais on s’y est tous mis rapidement.” “On s’est débrouillés”, complète Olivier Pigat, prof d’anglais en BTS à Craponne. “Il a fallu amener les élèves à plus d’autonomie”, explique-t-il.Des élèves en ont tiré des bénéfices certains : “Les plus réservés se sont sentis plus en confiance : sans la pression des autres, certains ont participé plus en l’espace d’une demi-heure que durant tout un trimestre !”, témoigne-t-il. Sans se substituer aux heures de soutien qui existent déjà, cet enseignement à distance pourrait permettre d’accompagner des élèves, “en petits groupes”.S’il en est un, en tout cas, qui reconnaît l’importance de tels outils, c’est Thomas de Saint-Genis-Laval. A 27 ans, ce jeune entrepreneur, “explorateur aventurier” comme il se définit volontiers, fait vivre aux écoliers, par écran interposé, ses périples à travers la planète. L’une de ses dernières expéditions au Groenland, a fait sensation : ses visioconférences — des “webinars” dit-il — lui permettent de partager sa passion aux plus jeunes. Une expérience qu’il entend bien pérenniser.Avec la crise sanitaire, le monde de l’enseignement s’interroge. De nouvelles pratiques pédagogiques pourraient émerger, à en croire Fabienne Touraine, inspectrice de l’Education nationale. Comme celle, pour les plus grands du moins, de la “classe inversée”. Ce mode de pédagogie ne manque pas de séduire les pays scandinaves. Son principe ? Les cours à la maison, les devoirs en classe. Jean-Paul Gomez nuance toutefois cette ouverture aux nouvelles pédagogies : l’école reste, de son avis, “le réceptacle au sein duquel les élèves apprennent des connaissances, y compris la citoyenneté”.
L’Union européenne au chevet des états membres
Si l’éducation n’est pas une compétence propre de l’Europe, un plan numérique est toutefois en cours pour “connecter les écoles et former les enseignants”, explique Audrey Soria, administratrice générale de la Maison de l’Europe et des Européens, à Lyon.Face à la crise, “l’Europe n’est pas restée inerte et a prouvé qu’elle pouvait prendre des initiatives”, confirme Alain Malegarie, président de la Maison de l’Europe.Sur le plan économique, “la Banque centrale européenne (BCE) a réorienté des fonds pour injecter, en deux mois plus de 1 000 milliards d’euros dans les systèmes bancaires européens, rappelle-t-il. Elle a aussi aménagé les dettes de certains états membres et demandé aux banques de chaque pays, de desserrer les conditions d’accès aux crédits, aussi bien pour les citoyens que pour les entreprises ou les collectivités territoriales.” La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a aussi annoncé vouloir “un plan Marshall pour assurer l’avenir de l’Europe”.Autant d’initiatives qui pourraient (peut-être ?) redorer l’image de l’Europe. Teresa Bernardini qui s’occupe du jumelage franco-italien entre Brignais et Ponsacco, espère que l’Europe retrouvera enfin “une image positive”, notamment auprès des plus jeunes. “Il faut poursuivre les échanges entre pays européens et proposer, pourquoi pas à la jeunesse, des rencontres sportives”, dit-elle, pour faire naître, en eux, ce sentiment d’appartenance européenne. Le programme “Erasmus +”, ouvert aux étudiants et même aux comités de jumelage, y contribue. Et soit dit en passant, c’est le moment d’en profiter, car “son financement va doubler”, insiste Audrey Soria.
Face à la crise, le monde économique s’organise pour trouver des solutions
“Je suis inquiète pour les salariés et les entreprises”, souffle Elisabeth. Banquière de profession, elle craint nombre de plans sociaux dans les semaines qui viennent. “La situation économique est catastrophique”, reconnaît Marc Gorgette, restaurateur, contraint de se mettre à la vente à emporter, en attendant des jours meilleurs. Cédric Le Bel dirige, lui, une centrale d’achat pour les opticiens : “J’ai dû rapidement acheter des milliers de masques en Asie, pour mes équipes à Hong-Kong et en Chine, mais aussi pour mes clients en France”, explique-t-il. Pour lui, cette crise aura eu le mérite de “valoriser la subsidiarité : on ne peut pas tout attendre de l’Etat, explique-t-il. Les chefs d’entreprise ont dû s’organiser, trouver des solutions, tout comme les maires dans les communes. Des solutions peuvent émerger au niveau local.”Autre témoignage, dans le domaine de la mode. Dominique Gozard et son épouse qui distribuent des Accessoires de Mode dans un réseau de 450 boutiques en France et 350 à l’international. “Nous sommes à l’arrêt, confie-t-il. Mais nous remercions notre banque qui nous a permis de limiter les dégâts. Toutes les marques d’articles de mode se sont mobilisées pour partager les bonnes pratiques.”Les agences immobilières, elles aussi, ont tenté d’innover. “Nous avons proposé des visites virtuelles, mais ça n’a pas du tout fonctionné”, témoigne Thierry qui doute du soutien des banques et attend plutôt un geste de l’Etat.
Les prescriptions des professionnels de santé
Médecin généraliste à la retraite, Nicole Bez tire les leçons de la crise. Lorsque l’épidémie sera terminée, il faudra conserver un numéro de téléphone pour l’information de la population afin d’éviter de surcharger le “15” ; continuer à ne plus se précipiter vers les services d’urgences pour ne pas les saturer et privilégier son médecin traitant ; et développer les téléconsultations. Enfin, elle préconise désormais la prise en charge à 100% de tous les actes du médecin traitant, ceci afin de faciliter la prise en charge des patients compte tenu des problèmes de mutuelles qui risquent de frapper de plein fouet les citoyens au chômage dans les mois à venir ; Cette méthode s’inspire des services d’urgence qui eux ne demandent aucune avance de frais. Durant la crise, les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) jouent tout leur rôle : les professionnels de santé n’ont pas hésité à se mettre en contact et à échanger pour mieux faire face, ensemble, à l’épidémie. C’est par exemple le cas dans les Vallons du Lyonnais : “on a pu faire appel à la générosité des entreprises qui nous ont fait des dons de matériels et de masques, se félicite Charles Pencz, médecin. Notre prochain projet, pendant le plan de déconfinement, consistera à organiser les tests à partir d’un centre de prélèvements installé du côté de la piscine de Vaugneray.”A noter aussi : une entreprise locale, spécialisée dans l’innovation pour nos aînés, a mis en place la plateforme “MonsuiviCovid.com”, en collaboration avec des médecins, des ingénieurs et des spécialistes en innovation, comme l’explique Florence Mathieu. Son objectif : lutter contre le Covid-19 en inscrivant dans nos habitudes le suivi de nos symptômes et en adoptant, le cas échéant, une attitude d’isolement appropriée. “On prépare aussi une application, poursuit-elle. On a besoin de relais pour porter ce projet le plus loin.”
Vers une société plus solidaire et respectueuse de l’environnement ?
Les agriculteurs et les producteurs locaux ont, eux aussi, fait face à la crise. A l’instar de Matthieu Gloria, agriculteur dans les Monts du Lyonnais. Pour écouler ses 30 000 pots de yaourt bio initialement destinés aux cantines lyonnaises, il a dû se mobiliser “pour réorganiser nos ventes en direct”. Un élan de solidarité s’est manifesté sur les réseaux sociaux, avec succès. “Le défi à pérenniser est de rapprocher le plus possible les producteurs des consommateurs”, insiste-t-il.Gilles en est convaincu : cette crise nous aura permis de prendre conscience de “ce qui est vraiment essentiel, la vie”. “Dans le monde entier, des mesures extraordinaire ont été mises en place pour lutter contre cette pollution violente et invisible qu’est le Covid et qui a fait tant de malades et de morts”, relève-t-il. De la même manière, il faudra réagir avec autant de force, face aux autres pollutions, “peut-être encore plus graves que ce Covid”… Privilégier les circuits courts, valoriser les productions locales, réduire nos déplacements avec le télétravail sont autant de solutions, selon lui, pour préserver “la vie”.“Il faudra aussi pérenniser la solidarité, l’entraide entre voisins et aux personnes âgées”, conclut-il, appelant de ses voeux à une société plus solidaire. A Saint-Symphorien-sur-Coise, dans les Monts du Lyonnais, cet accordéoniste l’a bien compris : tous les soirs, il appelle par téléphone les anciens du village, “pour leur jouer un petit morceau en direct”, raconte Michel. Des petits gestes et des notes de musique… qui mettent du baume au coeur et qui changent la vie !
→ Les citoyens du conseil de circonscription ont prévu de se retrouver en visioconférence jeudi 14 mai à 18h pour faire le point sur leurs actions. La prochaine séance publique du conseil de circonscription est prévue jeudi 4 juin. Pour plus d’informations, vous pouvez contacter Fabienne Tirtiaux (fabienne.tirtiaux@gassilloud.fr).